Le nombre de propriétaires augmente, les cas d’accédants surendettés aussi. Les mensualités sont si élevées qu’ils réduisent tout le reste. Ils ne partent plus en vacances, ils ne font plus les boutiques. Ils n’ont même plus l’argent pour aménager l’intérieur de leur pavillon. Ils sont propriétaires, mais vivent « a minima ».
se loger dans de moins bonnes conditions.

D’habitude, ce sont plutôt des séparations qui poussent les propriétaires en galère à venir voir Leila Djarmouni. Au sein d’Action logement, ex-1 % logement, elle vient en aide aux salariés ayant des difficultés de logement.De plus en plus d’accédants à la propriété débarquent dans son bureau. 62 % d’entre eux sont des couples bi-actifs (contre 35 % en 1990).
Le surendettement explose
Le crédit immobilier à la française, basé sur la cautionnement et non sur une garantie hypothécaire, comme en Espagne, a évité les risques systémiques et une crise immobilière. Le contrôle opéré par les banques, plutôt prudentes depuis la crise de 2008, a aussi limité les accessions risquées. Une statistique, cependant, a de quoi inquiéter. D’après la Banque de France, le nombre de dossiers de surendettement comprenant une dette immobilière a bondi, passant de 218 000 en 2010 à 231 000 en 2015. Ils représentent 13 % des dossiers, contre 8 % il y a cinq ans.
Cela ne surprend pas Jean-François Kiehl, porte-parole de Crésus, association de lutte contre le surendettement. Sur les 22 000 ménages suivis par la plateforme d’accompagnement et de prévention de l’association, près de 42 % sont propriétaires. « Quand on acquiert un bien immobilier, il y a tout un tas de dépenses à anticiper : les charges de copropriété, les travaux, les taxes, les frais de déplacement… Or les banques n’en parlent pas et ne font pas de travail de prévention. »
Propriétaire d’une maison
sans canapé, ni décoration
Des familles n’ont plus de quoi payer la licence de football d’un enfant. D’autres ne partent plus en vacances. C’est le logement ou la vie. La sociologue rapporte le cas de cette femme qui n’a pas pu installer sa cuisine ni acheter un canapé. Elle a une maison, mais c’est une maison vide, sans décoration. «Dans ce cas, les propriétaires étranglés par leur crédit immobilier font souvent le mauvais choix : ils multiplient les crédits à la consommation, raconte Jean-François Kiehl. Cela ne fait que retarder l’échéance. »

Article paru dans le supplément Logement à l’Humanité Dimanche, paru le jeudi 17 décembre 2015. Photo de Môsieur J. issue de la série #IciBientôt , représetant des détails d’images publicitaires de promoteurs immobiliers.